GARNE Mohamed
A.V.G.A


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Pourquoi cette amnistie amnésie à ce jour ?

Depuis 20 ans de combat judiciaire de lecture, d’écoute et de réflexion afin de comprendre la guerre d’Algérie tout en repuzzelant ma vie et celle de ma mère que quelques soldats ont souillés au nom de la pacification de l’Algérie, je me pose encore la même question « d’où viens ce désir de silence », je l’ai même baptisé le « syndrome de la peur d’après guerre ».

J’ai dû apprendre et avaler mon histoire sans vomir au sens propre du mot,et heureusement grâce à Dieu j’ai gardé la tête froide tout en ayant le coeur chaud de faire lever le tabou du crime qui m'a vu naître.

Oui j’ai mené mon combat tout en sachant que le parcours sera plein d’embûches et pourraient froisser mon honneur, ma personne et ma propre famille dans leur vie quotidienne. Je suis un peu a l’image de ceux à qui on annonce qu’ils vont à la guerre de force, ils y vont mais font tout pour ne pas tuer son prochain et basculer dans l’horreur, quitte à se retrouver martyr comme Maurice Audin ou bien Larbi ben M’hidi, être enfermé dans une forteresse comme le regretté général Delabolardière, ou de se retrouver débile et faire partie de la liste des oubliés.

En tout cas mon site englobe toute les misères que j’ai enduré depuis huit ans que je suis venu non pas pour défier l’état mais lui demander des comptes au sujet de ma naissance qui fait de moi un français par le crime. J’ai perdu mon emploi par abus de pouvoir car mon employeur ne voulait pas que des journalistes puissent m’interviewer pour « l’envoyé spécial » de septembre 2002 en vidant les ordures puisque c’était mon travail de tout les jours. Mon employeur ne voulait pas de moi, pas pour des motifs d’ordre professionnel, mais simplement parce que j’étais reconnu comme « victime de guerre » et que mon histoire faisait la une de la presse française et internationale.

Pourquoi le statut de « victime de guerre » peut-il valoir pour certains et pas pour d’autres? Par principe j’avais décidé de dire « non » à cette injustice pour ne pas sombrer a mon tour dans ce cocktail assourdissant de l’amnésie qui vous rappel cette fameuse amnistie de l’homme du 18 juin 1940.

Malheureusement, j’ai perdu mon procès et j’étais forcé d’abandonner ce combat car je n’ai pas bénéficié de l’aide juridictionnelle auquel j’avais droit, pour des prétextes bidon.

J’ai goutté à la torture psychologique et psychique, j’ai vu les geôles du roi soleil et la justice à chaque fois plus aveuglé par cette encombrante amnésie amnistie.

Le crime de guerre qui m’a vu naître a été reconnu en novembre 2001 par la cour des pensions du tribunal de Paris. Cela n’a pas suffit à convaincre le conseil d’Etat de me laisser continuer mon combat face a l’état français pour une demande de dédommagement pour « crime de guerre ». Moi je considère l’état comme mon géniteur officiel étant donné que les archives et les mémoires sont scellés par cette collante amnistie amnésie.

Dans les précédents réquisitoires du commissaire du gouvernement on me fait savoir qu’une loi de sous le prétoire de louis Philipe (où vit ont ?) m’attribue le droit de demander un dédommagement dans un délais de quatre années à partir du jour ou j’ai eu connaissance des faits. La cour d’appel de Paris m’a imposé mars 1991 comme date de départ de la connaissance des faits, ce qui à leurs yeux ne me laisse aucune chance puisque je n’arrive en France qu’en juin 1998. Et cela a été suivi par la cour de cassation qui n’a pas voulu juger le fond du dossier. Bien sûr, cela fut une fausse aubaine pour le commissaire du gouvernement. Encore une fois, une amnistie exécutée par la justice française.

L’erreur était flagrante, puisque j’ai démontré à la cour que la date de mars 1991 est la date d’un jugement d’une reconnaissance de filiation en paternité et non pas la date de reconnaissance en tant que victime de guerre. Si même je voulais déposer plainte contre l’état français, la demande aurait été rejetée en 1991 par la justice Française car il est impossible d’acquérir une filiation tout en accusant un état sans aucune mention de crime, j’aurais même risqué des poursuites judiciaires pour accusation sans aucun justificatif.

Je versais dans le dossier non pas des mensonges mais des documents du verdict final de la cour suprême d’Alger d’avril 1994 qui annule la filiation de mars 1991 et me reconnaît comme enfant née dans un camps de concentration à la suite du viol de ma mère par des militaires français. 34 jours après le verdict de la cour suprême d’Alger, je fis ma demande de nationalité française auprès du tribunal d’aix en Provence tout en précisant dans quelles conditions j’étais né, car il faut savoir que pour faire une demande de réparation au ministère de la défense il faut avant toute chose être français « loi n°59-901 du 31 juillet 1959 » et si ce n’est pas le cas ce même ministère vous renvoi vers les accords d’Evian du 19 mars 1962 qui stipule que pour toute demande de réparation l’algerie a pris la responsabilité d’indemniser les victimes des crimes perpétré par l’état français durant la colonialisation.

C’est cette dernière explication que j’ai reçue de la part du secrétaire d’état aux anciens combattants et victimes de guerre, monsieur Jean-pierre Masseret. Suite à cette conclusion, j’ai fais le 02 juin1998 une demande de réparation pour « victime de guerre », sachant qu’on ma attribué la nationalité française le 26.12.1996 et que j’ai du attendre encore deux années pour acquérir le droit de quitter le territoire algérien (voici une preuve de plus qui justifie deux années de retard de la part d’un organisme appartenant a la France). Le consulat me faisait savoir que dès mon arrivée a paris, j’irai directement faire mon service militaire. Pour moi il n’en était pas question puisque tout d’abord j’avais déjà fait huit mois de service national en Algérie et deuxièmement je n’avais aucune confiance vu mon différent avec l’état français.

Après de moult correspondances et harcèlements auprès du consulat de France en leur faisant savoir que j’allais ébruité mon histoire auprès des droits de l’homme, on me donna mon passeport et l’assurance que j’étais dégagé du service national français le 19 avril 1998 comme par enchantement...

Donc le conseil d’état aurait dû constater que le commissaire du gouvernement avait menti et avait volontairement dissimulé le sens du jugement de mars 1991. Le conseil d’état a jugé la forme du dossier ce qui est tout a fait différent du fond puisqu’elle a ignoré l’autre jugement, celui de la cour suprême d’Alger d’avril 1994 qui, je le répète, annule la reconnaissance en paternité de mars 1991 et me reconnaît en tant que victime de la guerre d’Algérie car né d’un viol commis par des soldats français dans un camp de concentration. On en arrive à la conclusion que c’est bien la date d’avril 1994 qui constitue la date de connaissance des faits pour faire valoir mon droit de réparation en tant que victime de guerre.

En 2001, le professeur en psychiatrie Louis Croq, a été désigné officiellement par la cour des pensions du tribunal de Paris afin de rendre son expertise sur mon état psychique et physique et vérifier si mes troubles psychologiques avaient un lien avec le crime de viol de ma mère. Cette expertise a été très douloureuse car elle a fait ressortir tout le mal que je portais de mon histoire. L’expertise a défini que mon état de santé se dégrade non pas dans la violence mais dans cette mentalité de combat et de ruminement quotidien de la même discussion. Voici le contenu de l’expertise de août 2005 « syndrome post-traumatique avec troubles du sommeil majeurs, cauchemars, thymie dépressif+++ angoisse, isolement, désinsertion professionnelle et familiale. »

J’aimerais souligner avec insistance que tout a été fait pour faire barrage à ma demande de réparation pour troubles psychologiques de guerre, alors même que les lois de la république me sont favorable. En effet, la loi du 10 janvier 1992 déterminant les règles et barèmes pour la classification et l’évaluation des troubles psychiques de guerre, précise clairement que dans le cas de ma maladie révélée par l’expertise est la seule dans le cadre de cette loi qui exempte le sujet du délais de quatre années exigé par la loi de sous le prétoire de louis Philipe et celle de 1968. Cette loi (voir en annexe) fût versée au dossier comme toutes celles que j’ai évoqué précédemment.

Cet entêtement de la cour à ne pas reconnaître mes droits n’a fait que renforcé ma détermination de poursuivre le combat jusqu’à son terme. J’ai décidé donc de porter mon affaire devant la cour européenne des droits de l’homme et si cela ne suffira pas, j’attaquerai l’état français pour non respect de la convention de Genève à propos des crimes de guerre (tortures et viols) perpétrés par la France durant la guerre d’Algérie.

C’est triste de constater qu’en pays se disant des « droit de l’homme » la justice est finalement politisée en favorisant la raison d’état sur le droit. L’état français a déjà fait l’effort de reconnaître ses crimes de guerre de l’époque du gouvernement de Vichy, et très récemment concernant l’esclavagisme. Les crimes de guerre en Algérie c’est pire encore car ils furent commis sous les ordres de la république française en toute souveraineté.

Alors pourquoi encore cette amnistie amnésie qui n’a que trop duré concernant la question de la guerre d’Algérie ? Pourquoi laisser tant de victimes de guerre, algériens et français, dans ce silence insupportable ?

Actuellement la France est en train de négocier un traité d’amitié avec l’Algérie, ce qui est impensable pour moi en étant une victime de guerre reconnue, je dis non à la signature de ce traité tant qu’il n’y a pas eu reconnaissance et réconciliation officielle au point de vue de nôtre histoire commune. Je dois dire qu’elle fût douloureuse des deux côtés militairement et de la part des deux peuples, seul un travail d’historiens et des deux communautés qui devrons tout faire pour que l’histoire s’écrive dans l’apaisement et cette commission sera chargé d’écrire l’histoire en lui restituant son âme que l’amnistie a amnésié il y a de cela prés de cinquante ans. Elle doit être mise en place dés l’officialisation de la réconciliation qui débouchera automatiquement vers ce traité de l’amitié franco algérienne qui ne fera que rendre les deux peuples encore plus proches.


MOHAMED GARNE



ANNEXE : « chapitre 2 aspect cliniques, section A psychosyndrome traumatique (névrose traumatique)

La névrose traumatique de guerre (ou en relation avec des catastrophes naturelles ou tout autre événement exceptionnel à caractère individuel ou collectif) doit être considéré comme une blessure et ne peut être assimilée, d’un point de vue structural, aux état névrotiques au sens classique attribué à ce terme en psychopathologie, qui constituent des maladies. Cependant, dans le cadre du travail d’expertise, elle constitue, comme les séquelles psychiques d’accidents ou de catastrophes du temps de paix, un état pathologique consécutif à des situations particulières (non exclusif de la possible association avec une agression physique contemporaine) où lié à l’exposition à des situation de danger, soit exceptionnelles, soit apparemment banales, mais comportant toujours des répercussions psychologiques pour le sujet.
Le mode évolutif de la névrose traumatique (principalement de guerre) et le rapport très particulier que le malade y entretien avec ses symptômes ont deux conséquences qui méritent d’être soulignées : le point de départ des troubles est rarement mentionné dans les documents médico-administratifs contemporain de l’événement traumatisant ; le moment où il fait l’objet de plaintes de la part du patient peut être très tardif, après des années d’évolution.
L’événement traumatisant a, quand il s’est produit, souvent été minimisé par l’intéressé ou est passé inaperçu. C’est seulement dans les cas, peu nombreux,où il a été immédiatement suivi d’un épisode de bouleversement psychologique que l’on en trouve parfois une mention explicite dans les divers documents établis a cette occasion.
Du reste, le délai qui sépare l’événement traumatisant de l’apparition du syndrome de répétition peut être de plusieurs années : c’est la classique période de latence.
De surcroît, les sujets ne viennent se confier au médecin que lorsque les troubles entraînent pour une gêne où une souffrance majeure, c’est-à-dire, dans de nombreux cas, longtemps après leur installation.
La gêne fonctionnelle résulte de la conjonction de l’importance relative des symptômes spécifiques (syndromes de répétition) avec d’autres manifestations éventuelles (cf. « troubles névrotiques »et « troubles de la personnalité »).
Taux d’invalidité à évaluer en fonction de l’intensité du syndrome de répétition, notamment des troubles du sommeil et de et de la gêne provoquée par les autres symptômes : cf.chapitre3. »

Bientôt l’Association des Victimes de la Guerre d’Algérie

Vous êtes de plus en plus nombreux à soutenir ma cause à travers vos messages. Je vous en remercie de tout cœur, car votre soutient me donne l’énergie pour continuer ce combat. Vos témoignages m’ont permis de réaliser que celui ci n’est plus seulement le mien, c’est celui de tout les français et algériens touchés directement ou indirectement par les atrocités de la guerre d’Algérie.

C’est pour cela que j’envisage de créer une association loi 1901, pour offrir un espace de rencontre, de contact et d’échange de témoignages entre celles et ceux, français et algériens, qui ont subi des crimes abominables « sous l’occupation française».

L’objectif est de nous entre aider pour évacuer le traumatisme causé par cette guerre coloniale en partageant nos témoignages, et aussi pour trouver un soutient et un réconfort aux victimes.

Je mesure les obstacles pour nous tous d’oser en parler, mais il est primordial de le faire tout d’abord pour honorer nôtre devoir de mémoire collectif afin que personnes n’écrivent ou falsifient nos témoignages mais aussi pour que la future génération voie plus clair nôtre et leur histoire commune.

Toute proposition afin que naisse cette association est la bienvenue et tout le monde qui voudra y participer sera le bienvenu quelque soit ses convictions sa confession ou sa couleur. L’essentiel c’est que nous nous devons d’être utile à ce projet et bien évidemment être lucide et patient.

Vous pouvez me contacter en utilisant le « formulaire de contact » sur le site.

Je vous en remercie d’avance.

GARNE Mohamed.

Garne Mohamed © 2006